Intégrer le savoir expérientiel des familles
Une démarche essentielle pour assurer la qualité des soins et des services offerts


Intégrer l’expérience vécue par les familles dans la façon de prodiguer les soins et les services est essentiel et c’est une approche centrale au sein de l’Initiative. Or, un constat a rapidement été fait dès les débuts de MUSCO : les professionnel(le)s et les familles ne sont pas forcément habitué(e)s à travailler en collaboration pour mener à bien des projets. Et pourtant, quel que soit le sujet ou les départements concernés, ces projets impacteront ultimement les patient(e)s et leur famille. Il est donc essentiel de prendre en compte leur expérience dans une optique d’amélioration continue pour apporter des ajustements tout au long du processus. Cette démarche va d’ailleurs de pair avec le fait de considérer les patient(e)s comme des partenaires à part entière. Des efforts bénéfiques pour toutes et tous, tant pour les patient(e)s que pour le personnel du milieu de la santé.

Il est particulièrement important, voir fondamental pour les familles dont les enfants présentent d’importantes vulnérabilités sur le plan de leur santé, de respecter les différents vécus afin d’assurer la qualité des soins et des services offerts. Caroline Marie Fidalgo, Patiente-Experte sur le Pôle consultatif de MUSCO depuis 2021 et maman d’Alex Olivier, nous explique notamment que :
« […] pour un même diagnostic, la réalité à la maison, le vécu hospitalier et le portrait clinique peuvent être extrêmement différents. Il est important que les professionnel(le)s de la santé cessent de prendre des patient(e)s selon leur diagnostic. Ils doivent prendre les patient(e)s selon leur diagnostic ET leur propre réalité à la maison en plus du vécu hospitalier et du portrait clinique qu’a engendré leur diagnostic. Plusieurs médecins ont encore la mentalité de « je connais X patient(e)s avec la même maladie, je connais ça ! », alors que chaque patient(e) a pourtant ses particularités. Ce qui fonctionne avec Patient(e) A peut très bien ne pas fonctionner avec Patient(e) B, même s’ils ont un diagnostic identique. Cas vécu avec mon fils ! »
Pour intégrer ce vécu hospitalier et ce portrait clinique au-delà du diagnostic, il faut collaborer. Et ce ne sont pas que les patient(e)s qui en bénéficient, ce sont aussi les professionnel(le)s : en intégrant les priorités des familles dans leur pratique, les professionnel(le)s peuvent adapter les soins offerts et obtenir de meilleurs résultats.
Comment ce savoir expérientiel des familles est-il intégré dans MUSCO ?
Dès les débuts de l’Initiative, des familles ont été recrutées pour être :
- Patient(e)s-Expert(e)s afin d’aviser sur l’ensemble du programme et possédant une expérience significative et une capacité de recul sur les objectifs fixés par l’Initiative ;
- Patient(e)s-Ressources et participer aux groupes de travail MUSCO afin de contribuer activement à la réalisation des projets de l’Initiative, à titre de collaborateur(trice).

Ainsi, six Patient(e)s-Expert(e)s sont actuellement actif(ve)s au sein du Pôle consultatif, pour un total de 10 parents impliqués depuis la création du pôle. Parmi leurs rôles figurent : donner des conseils, formuler des avis, transmettre des recommandations sur les différents projets de l’Initiative en cours ou à venir, s’assurer de l’ancrage terrain des projets et conseiller sur les orientations de l’Initiative. De plus, deux des Patient(e)s-Expert(e)s, siègent sur le Comité exécutif qui établit les grandes orientations et objectifs de l’Initiative.
Du côté des Patient(e)s-Ressources, on compte plus de 40 mobilisations jusqu’à présent pour co-construire les projets. Ils ont notamment contribué à la programmation de tous les événements d’informations pour les familles et à celle des éditions du colloque pour les bénévoles en pédiatrie. En complémentarité et pour favoriser cette participation, les professionnel(le)s ont aussi bénéficié d’un soutien à l’intégration du savoir expérientiel des familles par le biais de deux ateliers de sensibilisation qui ont été organisés auprès de 50 participant(e)s.
Il s’agit en effet de prévenir les possibles incompréhensions et ou perceptions divergentes. C’est d’ailleurs l’avis de Caroline Marie :
L’intégration du vécu expérientiel des familles dans les projets est importante, car plusieurs personnes qui ne sont pas sur le terrain (gestionnaires, décideurs, etc.) ne connaissent pas ce qui se passe réellement sur le terrain. Ils croient souvent que tout se passe bien, que les parents déforment la réalité vécue au sein de leur établissement, etc. En ayant à une même table des familles et des gestionnaires/décideurs, cela permet à ces derniers de mieux comprendre notre réalité et, peut-être, apporter des modifications aux procédures et manières de faire. Ou du moins, c’est ce que j’aime croire !
Les divers ateliers menés au sein de l’Initiative pour favoriser l’intégration du savoir expérientiel des patient(e)s ont d’ailleurs mené à la rédaction de ressources qui sont disponibles à toutes et à tous sur le site Internet de MUSCO, à savoir un guide pratique portant sur l’intégration des Patient(e)s-Ressources dans les groupes de travail et un guide pratique portant sur l’évaluation des projets prenant en considération l’expérience patient(e)-famille.
Et pour l’avenir ?

Fait intéressant, plusieurs de ces Patient(e)s-Expert(e)s ont eu l’opportunité de venir présenter les démarches qu’ils mènent au sein de l’Initiative lors de conférences telles que les réunions annuelles de la Société de Scoliose du Québec ou le tout premier forum québécois portant sur le polyhandicap au Québec. Une expérience qui leur aura permis, au-delà de partager leur vécu, de sortir de leur zone de confort et de pouvoir prendre la parole dans un espace qui ne leur était pas nécessairement accessible auparavant.
Caroline Marie mentionne d’ailleurs :
J’espère qu’en parlant de notre vécu (qui est on-ne-peut-plus-complexe dans mon cas, en raison du syndrome multi systémique de mon fils !), peut-être que les gestionnaires/décideurs apporteront des modifications aux procédures et manières de faire. Le parcours patient(e) est déjà difficile pour des cas médicaux simples; avec un enfant ayant des soins complexes, c’est souvent la maison des fous d’Astérix. Il faut également souvent se battre pour que nos enfants aient ce à quoi ils ont droit, pour se faire entendre en tant que parent avec un enfant ayant des besoins différents de ce à quoi les professionnel(e)s de la santé sont habitués. Je me compte chanceuse d’avoir les connaissances que j’ai dans le domaine médical et d’être en mesure de gérer les 1001 rendez-vous, courriels, formulaires, professionnel(e)s de la santé, suivis… Je sais que ce ne sont pas toutes les personnes qui sont aptes à le faire, tant d’un point de vue émotif que pratique. Si ma contribution peut faire en sorte que le parcours patient(e), les procédures/manières de faire et autres se rattachant au vécu expérientiel des familles deviennent un peu plus faciles, ce sera déjà ça !
Les efforts d’intégration, la collaboration, la considération réelle en tant que partenaires, le renforcement du rôle des patient(e)s, la co-création de guides et d’activités d’apprentissage pour les professionnel(le)s et les patient(e)s. Telles seront les actions qui continueront à être menées durant la dernière année de MUSCO pour continuer à aider Caroline Marie et tous les patient(e)s impliqués dans le programme à planter ces petites graines.
Et s’il y a bien une chose que l’Initiative MUSCO espère avoir accompli en la matière, c’est d’avoir servi d’intermédiaire efficace en facilitant le partage des connaissances et la collaboration en continue entre toutes ces parties prenantes et au bénéfice ultime des familles !